Voilà bien un livre qui prouve qu’en France, nous ne sommes pas si mal lotis en matière de liberté d’expression ! Il serait un rien « blasphématoire » (sic) de prétendre que son auteur, Patrick Declerck, y exprime et y déploie une « sainte » colère. Car New York vertigo attaque fort – dès les premières lignes, le narrateur dit son horreur des voyages, des explorateurs, et surtout des « avions qui s’écrasent et leurs cons de pilotes ». La « sensiblerie universelle, le gnangnan chroniquement diabétique » ne sont pas sa tasse de thé. Et quand il aperçoit des religieuses, ces « pauvres filles sans âge », il « enrage (…) devant l’un de ces spectacles de tant et tant de vies gâchées pour rien ». Il s’« efforce de ne pas crier : Foutez le camp, volailles ! Cassez-vous dindons ! Le ciel est vide. Vide ! Vivez, connasses ! Vivez rien qu’un peu, avant de crever ! »
Le ton est donné. La charge se mène tambour battant. Avec un plaidoyer pour la haine qui ne cherche pas ses mots – et c’est un euphémisme : « Permettez-moi d’insister un instant… je ne dis pas simplement critiquer, déplorer (…) etc. Non ! Non ! Fort vulgairement, je persévère et dis bien : Haïr ! Haïr ! », excellent remède pour, entre autres, « se purger enfin la vésicule biliaire ».
Le lecteur en est estomaqué – il cherche donc l’objet de cette fameuse haine.
Les terroristes. À savoir les « dix-neuf enculés » responsables de 2 983 morts lors des attentats du 11-Septembre 2001, dont on apprend que « quelques heures avant d’exploser leurs vies superflues dans la première Tour », ils ont « téléphoné à un service de prostitution », mais ont « trouvé que c’était trop cher ». « Glorieux, mais puceaux… Loosers ! Wahhabites de mouche ! » s’insurge le narrateur.
C’est donc l’histoire d’une commémoration : « 11 septembre 2001 – 11 septembre 2012. » Les noms des victimes sont inscrits aux fontaines « qui sont aujourd’hui tout ce qui reste des tours de 2001 ». Il faut « une heure et demie » pour les lire. Celui qui parle nous explique qu’il a attendu onze années pour se rendre sur les lieux de la catastrophe, alors même (et peut-être pour cette raison) qu’il a passé sa jeunesse à Manhattan, sa « patrie ». Il vient en effet d’apprendre qu’il lui faudra « subir une opération éveillée du cerveau six mois plus tard », et il n’est pas « absolument certain de survivre à cette intervention ». Quitte à « crever peut-être bientôt », il se dit que le temps est « venu d’aller enfin rendre hommage aux victimes new-yorkaises de la folie coranophile ».
Le livre tourne alors au réquisitoire – avec une attaque en règle de toutes les religions quelles qu’elles soient : Jésus, « traditionnellement surnommé petit par la légère pédophilie, consciente ou inconsciente, de beaucoup de ses aficionados », est ainsi traité de « polygame furieux depuis vingt siècles » (ce qui ne manque pas de sel, car justement je publie en ce moment un essai sur ma rencontre avec Jésus : J.-C. et moi – Se créer d’amour, aux éd. François Bourin). Pour finir, le narrateur est étouffé par la « honte d’appartenir à cette imbécile et folle espèce humaine ». Pour lui, les « hommes, partout, se valent. C’est-à-dire que généralement ils ne valent rien ».
Dans ce contexte, le portrait des terroristes est bien sûr dressé au vitriol, au cours de pages implacables qui mettent parfois mal à l’aise. Répondre à la haine par la haine, est-ce vraiment la solution ? Le lecteur peut se poser la question, jusqu’au moment où il sent la tendresse s’infiltrer, ici ou là, comme lors du pèlerinage à Manhattan, dans ce qu’il fut et qu’il n’est plus, et où une partie de la vie du narrateur est demeurée gravée. Ensuite, « devant le colossal Hudson avec, au loin, le Verrazano et puis, après, le vrai de vrai océan », il se sent mieux. « C’est mon papa qui m’avait appris ça quand j’étais petit… Il disait qu’une rivière, c’est toujours comme une sorte de train qui mène à un océan. Et qu’un océan, n’importe quel océan, c’est déjà la terre entière qui appelle… »
Notons aussi le passage, totalement bouleversant, de cet homme qui, ce 11 septembre 2001, saute d’une des tours pour échapper aux flammes, « en espérant une mort plus instantanée ». « Il porte un pantalon foncé, une chemise blanche et une cravate à laquelle il n’a eu ni le temps ni peut-être l’idée de renoncer… Il tombe et tombe et tombe comme dans un las abandon de lui-même… Les bras ouverts, il semble s’abandonner à ce destin qui se moque de lui (…) Il tombe comme tomberait un oiseau mourant (…) À un moment, le vent le pousse jusqu’à ce qu’il heurte un mur du bâtiment… Il rebondit sans geste, résigné, vaincu. »
Alors comment un tel ouvrage peut-il bien s’achever ? Eh bien, justement, par de l’amour, un « God bless you » que je vous invite à découvrir – même si celui qui parle prétend que « si Dieu existait, nous saurions fort bien, Lui et moi, que de Sa bénédiction, je ne vaudrais absolument pas la peine… »
New York vertigo, Patrick Declerck, éditions Phébus (Littérature française), 13 euros.
Il y a la tentation de lire ce livre pour la description qui est faite du ton de l’auteur et de sa liberté d’écriture… et puis non, pas sûr au final.
Les attentats du 11 septembre, on ne sait toujours pas qui a organisé ça. Car des [gros mot supprimé] dans cette affaire, il y en a un paquet, pas seulement 19.
Les vrais commanditaires se la coulent douce, et ce, bien avant et bien après cet événement majeur qui a fait basculer le monde entier dans les guerres sans noms et sans prétextes autre que celui de la suprématie énergétique. Cela a ouvert la porte aux pouvoirs d’état en place pour lâcher polices et armées dans les villes, dans les contrées riches en ressources minérales. La peur engendrée, les peurs, sont devenues un fond de commerce lucratif qui auto-alimente ces pouvoirs.
Le sujet est-il abordé ?
Bonjour Bernard. Vous êtes bien sûr libre de penser ce que vous voulez. Maintenant, pour obtenir une réponse à votre question « le sujet est-il abordé ? », le mieux est encore de lire le livre de Patrick Declerck afin de vous faire votre propre opinion.
Aparté : tout le monde a le droit de s’exprimer ici, néanmoins, nous rappelons que la forme des commentaires ne doit pas contenir de termes injurieux et qu’un contenu avec arguments étayés (voire sourcés) est préférable. Merci.