Quand je serai morte, merci de m’accorder le non-souvenir ; de ne pas m’offrir votre chaude étreinte.
Laissez-moi froide comme de mon vivant, alors que vos mains m’eussent en ce temps-là ragaillardie. Laissez-moi là où vous m’avez ignorée. Je n’étais pas dans votre esprit ; veuillez ne pas m’y inviter maintenant que je n’écris plus.
N’allez pas vous gaver trop tard de mes mots ; ce n’était pas votre préférence ni votre ordinaire. Alors moi défunte ils vous empoisonneraient la chair.
*
Quand je serai morte, merci de me garder votre oubli ; de me conserver l’inexistence.
Persistez-moi dans le non-souvenir ; gélifiez-moi dans la transparence éternelle.
Souffrez que mes pages n’eussent jamais été noircies.
Cela n’a pas été. Cela ne sera pas. Vous n’avez pas lu. Vous ne lirez pas.
À l’instant je songe à mon cercueil porté jusque dans l’église. Et vous au premier rang, planté dans votre admiration posthume ; harnaché de regrets plâtreux.
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Quand je serai morte, merci de me maintenir dans votre dédain ; de me laisser là tout en bas, la bouche pleine de sol.
Votre pied sur ma tête ; mes phrases écrasées mais respirantes.
Malgré vous elles éclateront quand mon corps raide gagnera les flammes.
Contemplant ma combustion vous manquerez d’air ; tandis que moi plus. Au contraire j’en dégagerai.
Succès d’outre-tombe.
25 octobre 2022
À MON NON-SOUVENIR #1